On entre progressivement dans la Meseta, cet immense plateau situé autour de 900-1000 mètres d'altitude et qui couvre presque la moitié de la surface du pays. En ce qui concerne le Chemin, ce sera désertique, probablement venteux, long et plate, pour les quelques deux cents prochains kilomètres. C'est une section que plusieurs pèlerins redoutent, justement parce qu'au niveau touristique, il n'y a rien à voir, et parce qu'ici , la bulle risque d'être très grosse, ce qui ne plaît pas à tout le monde. Plusieurs s'arrêtent à Burgos d'ailleurs, ou encore font le trajet Burgos-Léon en bus pour continuer ensuite.
Je constate aussi que depuis cette deuxième rencontre avec Mathias, il y a quelques jours, je prend plus le temps de m'arrêter dans les églises et chapelles sur le chemin, lorsqu'elles sont ouvertes, car elles ne le sont vraiment pas toujours. Je fais même brûler un lampion lorsque c'est possible et je fais ma petite prière pour Raymond, mon ex-beau frère qui lutte contre la leucémie et dont je vous ai parlé il y a quelques semaines, et aussi pour Jesus Miguel, cet espagnol dont j'ai recueilli le souhait au Puy-en-Velay. C'est venu tout doucement et tout naturellement, je n'en reviens pas moi-même.
J'avais parlé de Raymond à Mathias l'autre jour, et lorsque celui-ci a réalisé quelle genre de personne est Raymond, il s'est empressé de m'expliquer à quel point il est important que tous ceux et celles qui le connaissent fassent tout en leur pouvoir et prient pour qu'il guérisse et vive le plus longtemps possible. Raymond est exactement le genre de personne qui fait tellement de bien à un si grand nombre d'individus que chaque jour de plus qu'il peut vivre apporte beaucoup de soulagement à la souffrance de centaines, voire de milliers de personnes. "Ici, sur le Chemin, la douleur est omniprésente et bien réelle, mais la souffrance n'est souvent qu'une option", m'a-t-il dit. En dehors du Chemin, dans la vie "normale", la souffrance est bien réelle et très grande. Elle afflige un très grand nombre de personnes partout dans le monde, de toutes sortes de façons, et l'important est de contribuer à la soulager le plus possible. D'où la très grande importance à aider une personne comme Raymond, qui a réussi à s'élever spirituellement au point de pouvoir soulager de grandes quantités de souffrance humaine. Il m'a assuré qu'il prierait pour lui.
Ce soir, je suis dans une "casa rural", l'équivalent des chambres d'hôtes françaises et de nos Bed & Breakfast. C'est une ferme située hors chemin et je suis ici avec deux autres couples français que je croise souvent sur le Chemin depuis une semaine. C'est vraiment très beau, et c'est la seule habitation pour des kilomètres à la ronde. Belle soirée en perspective.
On a effectivement bouffé comme des rois, en quantité et en qualité!
À bientôt.
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