dimanche 24 octobre 2010

Étape 57 - Jeudi 21 octobre - Sarria - Portomarin - 22,5 km

J'ai eu des nouvelles de Denis et de Philipppe hier soir. Ils sont tous les deux à deux jours de marche derrière. À moins qu'ils n'accélèrent, je ne les reverrai pas sur le Chemin, ni à Santiago, car je n'y resterai que le mardi après mon arrivée. Ce sera à Montréal qu'on se reverra, donc.

Quant à mon cher ami Patrick, il s'est rapproché beaucoup et n'est plus qu'à 18 km derrière. Il est encore possible qu'on puisse entrer ensemble à Santiago lundi, ou encore que je le voie arriver mardi s'il n'arrive que cette journée-là. Dans l'un ou l'autre cas, c'est super, mais j'adorerais qu'il me rattrape.

J'ai encore eu une météo superbe aujourd'hui et un sentier et paysages merveilleux. Je suis vraiment très gâté. Et puis tôt dans la matinée, j'ai fait la connaissance de Patricia, une mexicaine qui est en Espagne depuis une semaine et qui a décidé de faire les derniers 110 km du Camino depuis Sarria. C'était donc sa toute première journée sur le Chemin et j'ai marché avec elle presque toute cette première journée. Elle s'émerveillait de tout, des paysages, des arbres fruitiers, même des vaches, comme moi au tout premier jour. J'ai beaucoup aimé la voir réagir et ça m'a fait prendre conscience du fait que même si je trouve tout encore merveilleusement beau sur le Chemin, une bonne dose d'habitude s'est installée. L'émerveillement est moins intense qu'au début. Un petit rappel comme quoi on peut s'habituer facilement à tout, même à la très grande beauté.

Il y a nettement plus de monde sur cette dernière portion du Chemin. Plusieurs, comme Patricia, commencent ici, car un pèlerin n'a qu'à faire les cent derniers kilomètres à pied, ou les deux cent derniers à vélo, pour obtenir sa Compostela, une sorte de diplôme confirmant qu'il a complété le pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle. Pour les espagnols, c'est important pour leur curriculum vitae, car c'est très bien vu, et on m'a même dit que c'était fortement recommandé pour pouvoir travailler au gouvernement. Dans un sens, c'est correct, car pour la grande majorité des gens, marcher 100 km représente un gros défi et obtenir un document certifiant qu'ils l'ont fait est tout à fait correct. Et puis marcher ces cent kilomètres peut très bien donner le goût d'en faire plus, comme c'est le cas pour Patricia qui voudrait maintenant faire un vrai camino, plus long. Mais d'un autre côté, cette histoire de Compostela est une vraie farce, car le diplôme est le même pour quelqu'un qui a fait 2,500 km avec 12 kg sur son dos et un autre qui en a fait 100 avec 3 ou 4 kg. J'appelle ces derniers les coureurs de diplôme. Et puis le pauvre pèlerin qui en a fait des milliers et qui se blesse dans le dernier droit et qui doit rentrer à Santiago en bus n'y aura tout simplement pas droit.

Alors dans mon esprit, la vraie Compostela réside dans le cœur du pèlerin. Tout comme le véritable Chemin.















À bientôt.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

sympathique lecture, excepté (désolée) ce passage : ..."Mais d'un autre côté, cette histoire de Compostela est une vraie farce, car le diplôme est le même pour quelqu'un qui a fait 2,500 km avec 12 kg sur son dos et un autre qui en a fait 100 avec 3 ou 4 kg. J'appelle ces derniers les coureurs de diplôme."
N'a-t-il pas été dit : Luc 6-37 : "Ne jugez pas, et vous ne serez pas jugés ; ne condamnez pas, et vous ne serez pas condamnés ..." Amicalement

tontongirafe a dit…

Denis n'a pas tort et ne porte pas de jugement. Quand on constate qu'aujourd'hui, la Compostela est délivrée par une secrétaire en 5 minutes!
Moi qui en ai fait 2500 (km) justement, j'ai du me forcer pour aller chercher ce "machin".
Le crédential, oui, voilà qui permet à nos souvenirs, de nous situer dans les temps forts de ce Chemin de joies, d'émotions, de larmes parfois, d'humilité, de rencontres fraternelles entre pèlerins égaux.
La Compostela, pour la facilité d'embauche, les points supplémentaires en Université...non, merci !